Dans le cadre de la rubrique « Au Conseil d’Etat » du JCP A – Semaine Juridique – Edition Administration & Collectivités territoriales, j’ai l’honneur de chroniquer – chaque semaine – quelques arrêts et jugements de la jurisprudence administrative. Voici un extrait du prochain numéro :

CÉ, Sect., 13 mai 2024, Association Sos Méditerranée (& alii.) ; 3 arrêts (req. 472155, 473817, 474652 & 474507)

Le sauvetage en mer en « humanité » des migrants, oui, mais sous strict contrôle juridictionnel et de façon singulièrement ciblée

Au-delà des polémiques et des politiques stériles, il est un fait : on meurt encore et toujours en Méditerranée, à nos portes et près de nos ports, parce que des êtres humains trouvent la force de quitter les pays où ils souffrent pour tenter de rejoindre l’Europe et les terres dites des droits de l’Homme perçus comme de nouveaux Eldorados. Pourtant, leurs traversées de la Méditerranée parce qu’elles se font dans la clandestinité sont périlleuses. On meurt en Méditerranée et certaines associations ont décidé d’agir, à l’instar de la célèbre Sos Méditerranée en venant en aide, par des sauvetages en mer et de l’aide urgente aux migrants. Plusieurs collectivités (le département de l’Hérault et les villes de Paris et de Montpellier) ont décidé de soutenir ces actions par des subventions publiques contestées par leurs oppositions. Le Conseil d’État en rappelle ici solennellement le bien-fondé tant que l’octroi financier de soutien se cantonne à de l’aide humanitaire stricte (lorsque comme en l’espèce la bénéficiaire peut aussi avoir d’autres missions plus politiques) et conséquemment suivie, encadrée et contrôlée. C’est ce qui justifie que l’une des aides (celle de la ville de Montpellier ; req. 474652) estimée non assez ciblée (sic) n’ait pas été validée à la différence des deux autres.

Passons sur la motivation réelle (et vraisemblablement plus politique que juridique) des requérants ayant contesté devant des tribunaux des subventions publiques destinées à soutenir le sauvetage d’êtres humains sur le point de mourir. Passons pour ne pas pleurer sur cette inhumanité et soulignons l’importance de ces trois décisions que le Conseil d’État a rendues en formation solennelle de « section » en joignant quatre requêtes et trois décisions parallèles et habitées des mêmes principes forts : la compétence et la possibilité confirmées (art. L. 1115-1 Cgct) des collectivités territoriales (sans avoir à justifier d’un intérêt public local) de « mettre en œuvre ou soutenir toute action internationale (…) de coopération, d’aide au développement ou à caractère humanitaire » accompagnées le plus souvent (comme ce fut le cas pour la subvention parisienne) d’une convention destinée à clarifier « l’objet des actions envisagées » afin qu’il corresponde à des actions ciblées « sans interférer » souligne le juge « avec la conduite par l’État des relations internationales de la France » et rentrant strictement dans le cadre de la seule action humanitaire et non, par exemple, à des aides qui seraient jugées illicites à l’instar de celles qui encourageraient des migrations illégales ou, comme en l’espèce, des actions critiquant ouvertement les politiques européennes ou nationales en la matière. En ce sens, relève le juge, (???)

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