Résolution du Comité économique et social européen en soutien à l’accord de Schengen

CIRCULONS LIBREMENT, SOUTENONS SCHENGEN

Lors de sa session plénière des 17 et 18 février 2016 (séance du 17 février 2016), le Comité économique et social européen a adopté la présente résolution par 216 voix contre 1, avec 4 abstentions.

http://www.eesc.europa.eu/resources/toolip/doc/2016/02/18/dont-touch-my-schengen—eesc-presidents-support-schengen.mp4

La liberté de circulation est le succès le plus tangible de l’intégration européenne. L’accord de Schengen, qui permet aux gens de voyager librement d’un pays à l’autre pour leur travail, leurs études ou leurs loisirs et qui libère des entraves matérielles la circulation des marchandises et des services, est une pierre angulaire du marché intérieur, d’une valeur de 2 800 milliards d’euros, qui fait intervenir 1,7 million de travailleurs transfrontaliers et induit annuellement 57 millions de mouvements de transport routier par-delà les frontières. La suppression des contrôles aux frontières a joué un rôle significatif dans la destruction des barrières, le rapprochement des peuples et la stimulation de l’économie européenne. Plusieurs générations d’Européens ont grandi en bénéficiant de Schengen sans même s’en rendre compte. Le coût du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures est estimé à 100 milliards d’euros, soit 0,8 % du PIB, et serait synonyme d’appauvrissement culturel, social et économique.

Le Comité économique et social européen approuve sans réserve les principes qui ont conduit les États membres signataires de l’accord de 1985 à se dire «conscients que l’Union sans cesse plus étroite des peuples des États membres des Communautés européennes doit trouver son expression dans le libre franchissement des frontières intérieures par tous les ressortissants des États membres et dans la libre circulation des marchandises et des services» et «soucieux d’affermir la solidarité entre leurs peuples en levant les obstacles à la libre circulation aux frontières communes entre les États […]»: cet accord visait l’union des peuples et la solidarité entre les peuples. Y porter atteinte, ce serait donc, outre les conséquences économiques effrayantes que cela entraînerait, porter, à la solidarité et à l’Union elle-même, un coup qui pourrait s’avérer fatal.

Le Comité approuve également sans réserve le principe qui a conduit les États membres signataires du traité sur le fonctionnement de l’Union à prévoir que «l’Union développe une politique visant […] à assurer l’absence de tout contrôle des personnes, quelle que soit leur nationalité, lorsqu’elles franchissent les frontières intérieures», tout en prévoyant une gestion efficace du contrôle aux frontières extérieures (article 77, paragraphe 1).

Les membres du Comité économique et social européen, en tant que représentants de la société civile européenne, sont de plus en plus inquiets face aux pressions qui pèsent sur l’accord de Schengen. Le Comité appelle les gouvernements d’Europe à ne pas céder aux pressions populistes et à la peur, mais à défendre les droits pour lesquels nous avons lutté. Le Comité reconnaît que des événements récents ont révélé les sérieuses lacunes de la gestion des frontières européennes et de notre aptitude à suivre avec efficacité les mouvements de malfaiteurs. Il faut répondre à ces préoccupations, mais ce n’est pas Schengen le problème, et il n’y a pas lieu d’en faire un bouc émissaire. Les institutions de l’Union européenne doivent éviter à tout prix un démantèlement progressif des règles de Schengen, et partant, du marché intérieur, qui, au final, se ferait à notre détriment à tous.

La force de l’espace Schengen ne peut être uniquement celle de son maillon le plus faible. La protection des frontières de l’Union européenne devrait être l’affaire de tous, l’ensemble des États membres en partageant la responsabilité. Les engagements pris par les États membres pour mettre en place et consolider une agence Frontex efficace et opérationnelle doivent être respectés. En l’absence de contrôles efficaces aux frontières extérieures, l’Union ne sera pas en mesure de garantir l’accès à son territoire aux réfugiés qui ont besoin d’aide. En fin de compte, des contrôles efficaces aux frontières extérieures sont une condition préalable au maintien du système de Schengen. La sécurisation des frontières ne doit pas impliquer le rejet de ceux qui ont besoin de protection pour des raisons humanitaires, conformément à la convention de Genève.

Nous devons être prêts à trouver des solutions audacieuses susceptibles de sauvegarder nos droits et de protéger notre Union sans frontières internes, en permettant aux gens de travailler, de commercer, d’étudier et d’échanger librement des idées, des biens et des services. C’est là notre Europe, notre Schengen et nos droits sociaux et fondamentaux que nous devons défendre.

Le Comité adresse donc aux organisations européennes et nationales de la société civile un appel pour qu’elles manifestent leur soutien non seulement au maintien mais aussi à la consolidation de l’espace Schengen et à son élargissement. Il s’engage pour sa part à intervenir auprès des institutions de l’Union, et notamment du Conseil, pour que les États membres restent fidèles aux principes des traités et des accords qui représentent manifestement des acquis pour l’Union des peuples européens.

Le Président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS

cf. http://www.eesc.europa.eu/?i=portal.fr.news.38383

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